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Business - Financement

Le capital-risque, nouvel horizon des start-up tech

Le capital-risque, nouvel horizon des start-up tech
  • Publiéjuin 24, 2022

La tech du continent peut compter sur sa capacité de réponse aux besoins essentiels pour se développer. Peu en phase avec les investisseurs privés, cette vocation donne pourtant à voir des Success stories sous perfusion de fonds publics de développement.

 

Par Nicolas Bouchet

Le salon Vivatech a de nouveau ouvert ses portes à Paris du 15 au 18 juin après deux ans de format réduit en ligne, en raison de la crise sanitaire. Avec une présence élargie à l’Afrique du Sud et à l’OIF (Organisation internationale de la Francophonie), l’espace occupé par Africa Tech a reçu pour but de dresser un portrait plus fidèle des start-up de la technologie. Et aussi d’incarner quelques-uns des bénéficiaires des 4,9 milliards de dollars d’investissements de l’année 2021, en forte hausse après 2,4 milliards $ en 2020, selon l’estimation de Briter Bridges. Remis en perspective, ces montants ne représentent que 1% de l’investissement mondial dans ce type d’entreprise.

« Les investissements directs étrangers en Afrique représentent 6% du PIB mais les capitaux détenus par les fonds institutionnels en représentent 26% », fait observer Fatoumata Bâ, de Janngo Capital.

En comparaison, l’Europe a attiré en 2021 quelque 100 milliards $ d’investissements et l’Amérique du Nord pas moins de 330 milliards. Le parrain des Africa Tech Awards, Makhtar Diop, vice-président exécutif de l’IFC (Société financière internationale) rappelle que « 80% des start-up rapportent des difficultés de financement ». Et sous la pression de la crise, l’univers des start-up africaines s’est reformé autour de l’offre publique de financement, de l’accès à l’entrepreneuriat et de la spécialisation dans les services essentiels.

Le pavillon du Congo à l'Africa Tech Lab
Le pavillon du Congo à l’Africa Tech Lab.

 

Espérant créer un jour l’intérêt des investisseurs privés, les opérateurs étrangers et les institutions rivalisent d’outils de financement. Cet enjeu attire de nouveaux acteurs comme la coopération néerlandaise et son Ventures Program de de 200 millions d’euros dédié à la phase de croissance des entreprises innovantes qui opèrent dans la Fintech, l’accès à l’énergie et l’Agritech. Les seules Fintechs présentent une perspective de croissance estimée à plus de 3 milliards $ par le Comité économique de l’Île Maurice, spécialisé sur le sujet. Son représentant, Heerun Ghurburrun fonde son analyse sur les quelque 50% des transactions mobile money que concentre le continent africain avec 58% du total mondial des utilisateurs de ces services financiers. Mais l’essentiel du soutien au capital des start-up vient d’acteurs plus connus.

 

Répondre aux besoins de base

Chez les internationaux représentés à Vivatech, l’IFC (Banque mondiale), mène le jeu avec 179 millions $ investis en fonds d’amorçage dans des start-up africaines, conjointement avec la BEI, la BAD et les Pays-Bas. Proparco, filiale de l’AFD spécialiste du secteur privé, « travaille à connecter les start-up africaines avec les fonds de capital-risque », affirme sa directrice générale Françoise Lombard. Hôte de Digital Africa depuis octobre 2021, l’opérateur annonce avoir financé onze jeunes pousses, pour un total de 3,88 millions d’euros. Françoise Lombard affirme la cohérence de l’approche de Proparco dans un paysage où « les fonds de capital-risque sont composés à 50% de fonds publics de développement ». Autre institutionnel tricolore, BPI France affiche des ambitions envers les entreprises innovantes africaines qui se traduisent par la vente d’expertise aux pouvoirs publics. L’experte senior Innovation Agnès Laurent peut citer avec succès la fourniture d’une « plateforme numérique et boîte à outils commune pour coordonner les acteurs de l’écosystème et co-développer avec eux », outil mis au service du gouvernement sénégalais, en pointe en la matière.

La DER (Délégation à l’entrepreneuriat rapide) peut, en effet, témoigner de l’accompagnement technique et financier de 60 milliards de F.CFA (91,5 millions d’euros) au bénéfice de 415 entreprises, pour un budget de 75 milliards de F. CFA (114 millions d’euros) levés auprès des bailleurs. L’institution, représentée par la déléguée Mame Aby Seye, « a l’ambition de faire entrer le Sénégal dans le Top 5 des hubs d’innovation d’ici à cinq ans », en servant les trois piliers que sont le financement, l’accompagnement, et la promotion de champions. Et au-delà des start-up, l’enjeu de l’adoption du numérique par les TPME au moyen de l’émission de nanocrédits (de 15 à 800 euros) est la réduction du secteur informel et l’« inclusion financière de milliers de micro-entrepreneurs avec l’aide des opérateurs de Mobile money ». Pour les micro-entreprises tech, le succès de l’accès au capital relèvera pour longtemps de l’apport d’une réponse aux besoins de base.

Le pavillon de la Tunisie à l’Africa Tech Lab.

 

Au Rwanda, la crise sanitaire a fait que « les consommateurs achètent désormais en ligne et des PME vont maintenant sur le marché de la vente en ligne. Beaucoup n’étaient pas prêtes à devenir numériques », rappelle Robert Skidmore (International Trade Center). Parlant pour sa start-up béninoise, Boris Koumondji (FedaPay) rappelle que “pendant la période Covid, le paiement en espèces n’était plus possible. Nous avons développé des services pour que le gouvernement et les sociétés publiques puissent recevoir le paiement d’impôts et des services d’eau et d’électricité ».

 

L’enjeu des fonds publics

Au Congo, Daphné Mayet (Green Tech Africa) relève que « les investisseurs recherchent des start-up engagées dans l’accomplissement des ODD alors que nous parlons du réchauffement global tout en nous posant la question de leur croissance. Bénéfice et soutenabilité doivent prendre le même chemin ».

Et en Ouganda, la jeune entreprise de transports en commun EasyMatatu, représentée par son CEO Andrew Lema, « investit dans la formation sur la sécurité routière de nos chauffeurs pour rendre notre service meilleur que celui de la concurrence informelle. Cette formation est bénéfique aux passagers et à l’efficience du transport en commun, et elle réduit les émissions GES par km parcouru ». Tous ont bénéficié d’investissements publics convaincus par la valeur sociale du service rendu. Pour Fatoumata Bâ (Janngo Capital, Côte d’Ivoire), l’horizon de l’investissement privé demeure suspendu à la preuve d’un « effet BPI » qui maintient pour l’instant une dépendance au financement catalytique public : « Les investissements directs étrangers en Afrique représentent 6% du PIB mais les capitaux détenus par les fonds institutionnels en représentent 26% ».

 

Maurice Lévy, président du conseil de surveillance de Publicis Group et Makhtar Diop, vice-président exécutif de l’IFC.

 

Bonnie Mbthi, CEO de WEEE CENTRE et gagnant du prix Africa Tech dans la catégorie Climate Tech.

 

Makhtar Diop.

@AB

 

Écrit par
Nicolas Bouchet

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