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Analyse Industrie

Comment créer de la valeur par l’intégration

Comment créer de la valeur par l’intégration
  • Publiédécembre 2, 2022

Le Centre du commerce international détaille quatre secteurs susceptibles de bénéficier du libre-échange, par la création de chaînes de valeurs panafricaines. Reste à lever quelques obstacles qui, pour l’heure, laissent le continent à la traîne du commerce international.

 

L’Afrique présente un potentiel inestimable, et la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) est une clé déterminante pour le concrétiser. Tel est le point de vue du Centre du commerce international (ITC) qui publie, en collaboration avec l’Union africaine et la Commission européenne, une étude intitulée Fabriqué par l’Afrique, créer de la valeur par l’intégration.

On le sait, l’empreinte de l’Afrique sur le marché international est encore faible. Elle ne représente que 2,3 % des exportations mondiales, et son panier d’exportation principalement constitué de produits de base et de ressources naturelles. Seules 14 % des exportations du continent sont destinés à d’autres pays africains, et ces échanges concernent pour la plupart des produits semi-finis et transformés.

En conclusion, le rapport appelle à « un plan d’action holistique » pour appuyer le développement de chaînes de valeur innovantes et durables. Il faut donc définir une stratégie continentale qui s’attaque aux défis communs, détaille l’ITC.

Le renforcement du commerce régional est donc crucial pour appuyer une valeur ajoutée accrue, la diversification des chaînes d’approvisionnement, le renforcement de la résilience aux crises, et l’industrialisation – autant d’éléments qui contribuent à la création d’emplois et à l’amélioration des moyens de subsistance sur le continent.

L’ITC identifie les secteurs à fort potentiel pour le développement durable en Afrique, ainsi que les goulets d’étranglement qui freinent les entreprises. Son diagnostic des chaînes de valeur vise à appuyer la mise en œuvre de la ZLECAf en suggérant comment les gouvernements et les entreprises peuvent développer des chaînes de valeur durables.

À partir de 415 possibilités de départ, l’analyse des données a permis d’identifier 94 chaînes de valeur prometteuses et réalisables à l’échelle du continent, avant de s’arrêter sur quatre secteurs pilote : l’automobile, les produits pharmaceutiques, les vêtements en coton et les aliments pour bébés.

Un fort potentiel non exploité

« Chacune de ces chaînes relie au moins cinq pays africains de différentes régions et présente les possibilités suivantes : ajout de valeur, réduction des importations, stimulation des échanges commerciaux, diversification des économies, et génération d’opportunités pour les femmes et les jeunes. »

La crise sanitaire n’a fait que renforcer la pression politique massive pour renforcer le secteur pharmaceutique africain ; aujourd’hui, seuls 3% des intrants apportés viennent d’Afrique. Pourtant, « les entreprises pharmaceutiques mondiales louchent sur l’Afrique, et plusieurs initiatives visant à mettre en place des installations de production sont en cours ».

De son côté, l’automobile « présente un fort potentiel pour le commerce intrarégional ». En raison d’un marché continental vaste et en pleine croissance, des liens potentiels avec d’autres chaînes de valeur telles que le cuir et les machines électriques, et d’une collaboration croissante avec des multinationales étrangères, cette filière présente de nombreuses incitations à l’investissement.

Source : Centre du commerce international (ITC).

 

Dans les vêtements en coton, il subsiste, à en croire ITC, « un fort potentiel d’exportation intrarégional non exploité ». Tandis que la dépendance aux importations et l’énorme marge de manœuvre pour ajouter de la valeur aux étapes de la chaîne de valeur, comme la production de fils et de tissus, en font un secteur digne d’intérêt pour les investisseurs.

Dans l’alimentation pour bébés, la dépendance de l’Afrique à l’égard des importations, malgré l’abondance d’intrants disponibles localement, incite à l’approvisionnement et à la production au niveau régional. Ce secteur est aussi propice aux petites entreprises et à la création d’emplois pour les femmes.

Il subsiste, dans ces quatre domaines comme dans les autres, différents obstacles, exprimés par les entreprises elles-mêmes. Lesquelles regrettent le faible niveau des opérations commerciales intra-africaines. Généralement, les entreprises connaissent assez mal la ZLECAf, peu de dirigeants ont participé à des consultations public-privé sur les accords commerciaux envisagés.

Figurent d’autres réticences structurelles, comme le manque de confiance dans la qualité des produits. Cela réduit l’intérêt à s’approvisionner localement et certaines entreprises préfèrent se tourner vers la Chine alors qu’une production africaine existe ou est possible. C’est pourquoi ITC appelle à la construction d’un cadre de qualité continental solide.

Demeurent également, rappelle le rapport les difficultés souvent évoquées (financement, coûts de l’énergie élevée, infrastructures de transports insuffisantes, barrières douanières, etc.). Une partie de la solution réside dans les modèles d’économie circulaire.

 

Un savoir-faire technique insuffisant

De plus, « la durabilité devient une facette inéluctable de l’intégration régionale de l’Afrique ». Pour permettre une transition verte vers des chaînes de valeur durables, des investissements sont nécessaires à plusieurs niveaux : pour développer des technologies et renforcer les compétences, pour concevoir et appliquer de manière efficace des normes environnementales, pour réformer les réglementations, et pour instaurer des systèmes fiables de gestion et de recyclage des déchets. Des liens plus étroits entre l’industrie et le milieu universitaire aideront à stimuler des solutions innovantes.

Revenons aux quatre secteurs retenus : le savoir-faire technique limité et les faibles capacités de transformation étouffent la production pharmaceutique en Afrique. De plus, la concurrence des producteurs à faible coût d’Asie et le marché des médicaments contrefaits affaiblissent également la position concurrentielle des fabricants africains.

« Le secteur a besoin d’une infrastructure régionale de qualité et d’un système d’enregistrement des produits pour permettre la vente de médicaments par le biais d’une agence centrale, capable de vérifier la qualité des produits. »

Dans l’automobile, l’« absence d’une stratégie à l’échelle du continent a maintenu le secteur automobile africain très fragmenté », souligne le rapport. Qui appelle à « une stratégie à l’échelle du continent » ; certes, les normes sont en cours d’harmonisation entre les pays mais le processus doit être accéléré.

Si l’Afrique est le premier producteur de coton au monde, le manque de savoir-faire technique, de machines de production modernes et de personnel qualifié a laissé le continent dépendant des importations de fils, de tissus et de vêtements d’occasion bon marché. Souvent, le principal écueil vient du manque d’information et de règles divergentes entre les pays. Tandis que « le renforcement des capacités en matière de durabilité et l’accès à des financements abordables sont tout aussi essentiels pour la croissance du secteur et sa transition verte ».

Enfin, l’alimentation pour bébés doit affronter une capacité de production limitée et la faible confiance des consommateurs dans les marques locales. Là aussi, la stratégie doit passer par à une meilleure information sur les marchés, et par l’harmonisation et la reconnaissance mutuelle des normes et des certifications d’évaluation de la conformité au niveau continental.

Source : Centre du commerce international (ITC).
Source : Centre du commerce international (ITC).

@AB

 

 

 

Écrit par
Laurent Soucaille

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