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African Business Agriculture

Les ambitions portuaires d’Olam

Les ambitions portuaires d’Olam
  • Publiéoctobre 19, 2017

Le 14 octobre, Gabon Special Economic Zone (GSEZ) a inauguré le New Owendo International Port (NOIP) en présence du président Ali Bongo Odimba.

Par Marie-France Réveillard.

A cette occasion,  Cyrille Bolloré a annoncé la signature d’un contrat de sous-traitance entre la SCTG et Olam International Ltd., mettant un terme à plusieurs mois de polémique.

             

Photo: Art Vision System

C’est avec un certain faste qu’a été inauguré le nouveau terminal d’Owendo, devant une assistance venue nombreuse sur le Port, à la nuit tombée. Le Président du Gabon et son épouse, les représentants de l’Etat-major, le Président d’Olam Gabon, Cyrille Bolloré, DG de Bolloré Transport & Logistics (BTL), les principaux partenaires du projet entre autres invités de marque, ont participé aux festivités. Ballet aérien de trapézistes suspendues à une grue de chantier et feu d’artifice spectaculaire ont marqué la cérémonie.

Avec le NOIP, Olam a reconstruit les infrastructures gabonaises et a décongestionné le port pour un coût de 300 millions de dollars en « un temps record de 18 mois », comme l’a rappelé Gagan Gupta lors de la cérémonie d’inauguration. Cette initiative permet au groupe singapourien d’utiliser ses propres installations portuaires pour ses opérations d’import-export liées à l’exploitation et à la valorisation de la zone économique de Nkok dont il a la gestion. En effet, entre 2011 et 2015, le volume commercial d’Olam a été multiplié par vingt, passant de 71 000 à 1,53 millions de tonnes d’huile de palme.

Le projet est le résultat du Partenariat Public Privé (PPP) entre Olam International Ltd, Africa Finance Corporation (AFC) et l’Etat gabonais. Gagan Gupta a précisé qu’il s’agissait d’un « investissement direct sans dette de l’Etat ».

Opérationnel depuis juin dernier, le port a pour objectif de fluidifier l’import et l’export en réduisant les prix de l’acconage de l’ordre de 30%. « Plus qu’une stratégie de diversification, il s’agissait de se doter d’un outil logistique pour sécuriser nos exportations » a précisé Philippe Gery, Directeur de GSEZ Ports.

Photo: Art Vision System

NOIP : UN PORT AUX STANDARDS INTERNATIONAUX

 

Le NOIP gère 4 activités principales dont la manutention des conteneurs, le vrac solide et liquide, les marchandises conventionnelles mais aussi les services de logistiques comprenant le transport par camion, le groupage et le dégroupage des containers, le dédouanement et le freight-forwarding. D’une superficie de 18 hectares le Terminal possède une capacité de 3 millions de tonnes par an. Il est pourvu de 4 grues portiques sur pneu de type RTG, de 7 citernes d’une capacité totale de 10 500 tonnes pour le stockage de l’huile de palme brute (CPO), de 2 silos à grain d’une capacité de  10 000 tonnes et de deux autres silos de 5 000 actuellement en projet.

Parallèlement, le NOIP dispose de 4 grues pour les chargements et déchargements de navires dont 2 mobiles et de 18 remorqueurs. Enfin, le port est doté d’un nouveau quai long de 420 mètres de long et de 13 mètres de profondeur, avec deux positions d’amarrage pour porte-containers de type Panamax. « Nous disposons d’un parc de stockage à containers qui est situé juste derrière le quai et non plus à 1,2km, ce qui permet de réduire considérablement les coûts. Nous stockons aujourd’hui 4 fois plus de containers par hectare, par an » détaille Philippe Gery.

A ce jour, une extension des quais de 270 mètres est d’ores et déjà en cours de construction. Gagan Gupta se félicite de cette réalisation : « On a réussi notre pari, celui de faire un port répondant aux standards internationaux ». Le port affiche en effet, une modernité et des capacités plus importantes que celles proposées antérieurement par la SCTG. Il permet notamment à deux navires d’accoster simultanément. Avec une capacité de 180 000 containers par an, il dépasse les capacités globales du Gabon qui sont aujourd’hui de 130 000 containers. Par ailleurs, la zone portuaire du port cargo de GSEZ comprend la plus importante flotte de camions du Gabon (80 véhicules et 245 remorques) mais aussi un parc d’engins de levage, des hangars, un guichet unique, une agence de shipping et une station-service.

Photo: Art Vision System

BOLLORE RECUPERE LA GESTION DES CONTAINERS

Avec le contrat de sous-traitance signé entre Olam et Bolloré pour la gestion des containers, les dissensions entre l’Etat gabonais et le groupe français semblent dépassées. Alors qu’Olam a investit près de 300 millions de dollars pour construire le Terminal, le géant Bolloré, spécialiste de la logistique portuaire, a récupéré la gestion des conteneurs : « Nous apporterons notre expertise dans la gestion des 300 mètres de quais » a déclaré Cyrille Bolloré, le DG de Bolloré Transport & Logistics (BTL) lors de la cérémonie d’inauguration du port. La gestion du quai sera donc répartie entre Olam (420m) et Bolloré (300m). C’est donc par souci d’optimisation du port polyvalent, que la STCG qui possède déjà le terminal à conteneurs préexistant, devient l’opérateur de l’activité conteneurs du NOIP alors que GSEZ reste en charge des marchandises conventionnelles, du vrac solide et liquide, tout en fournissant ses services logistiques.

Le président gabonais n’a pas boudé son plaisir d’inaugurer un port moderne aux capacités renforcées : « C’est un rêve devenu réalité : Léon Mba en a rêvé, Omar Bongo l’a fait et nous l’avons modernisé ! (…) C’est un jour historique pour un projet symbolique » a-t-il déclaré, précisant : « J’avais fais la promesse d’être un président novateur et réformateur et le Port d’Owendo en est la preuve !  (…) le port représente une porte d’entrée en l’Afrique centrale ». Il a également déclaré que le NOIP était un véritable « instrument de lutte contre vie chère. » L’allocution du président s’est achevée par des remerciements soutenus à Cyrille Bolloré, le « partenaire historique qui a su s’adapter aux exigences (…) Ma première sortie après l’élection de 2009, c’était ici sur le port, avec votre père et aujourd’hui vous assurez la continuité. » Le Chef de l’Etat a également salué la performance d’Olam : « Vous nous avez habitué aux miracles et comme disait Omar Bongo : Plus on me donne, plus je réclame » conclue t-il.

Photo: Art Vision System

TROIS QUESTIONS A

Gagan Gupta a répondu à nos questions. A demi-mots, le Président d’Olam Gabon, lève le voile sur les ambitions du groupe singapourien et revient sur le partenariat avec le groupe de Vincent Bolloré…

Le New Owendo International Port est-il le reflet de la volonté d’Olam de s’inscrire durablement parmi les acteurs portuaires en Afrique, malgré une concurrence accrue ?

 Notre cœur de métier reste la logistique et l’agroalimentaire et nous ne sommes pas spécialisés dans les containers à ce jour. Nous avons cherché à répondre à un besoin pour faciliter nos exportations. Je précise qu’il s’agit à l’origine, d’un Partenariat Public Privé entre l’Etat gabonais, l’AFC et Olam car nous sommes essentiellement intéressés par la logistique agricole. Nous comptons exporter le bois, provenant de la zone économique Nkok.

Cette stratégie de développement portuaire sur le continent est nouvelle pour Olam mais nous réfléchissons à d’autres projets similaires dans les pays où nous sommes déjà solidement implantés. Nous n’excluons pas de devenir un opérateur portuaire sur le continent si nous y trouvons un intérêt car fondamentalement, le port et la logistique sont liés par nature.

Nous disposons déjà d’une expérience en la matière en Australie et en Ukraine. Ensuite, malgré la concurrence des autres acteurs portuaires, je pense que nous pourrions tirez notre épingle du jeu. Depuis combien de temps attend t-on le port de Kribi ?

Quels ont été les termes de l’accord qui vous lient avec le groupe de Vincent Bolloré ?

Il s’agit d’un deal commercial entre Olam et le groupe Bolloré, avec l’assentiment de l’Etat bien sûr, sans qu’il ne soit directement intervenu. S’agissant des conditions de notre accord, je peux vous dire que Bolloré a investi dans le NOIP, mais les termes contractuels ne sont pas encore dans le domaine public…

Nous avions commencé les négociations depuis un certain temps avec le groupe de Vincent Bolloré qui est une entreprise familiale très bien implantée en Afrique. Par ailleurs, nous travaillons avec ce groupe dans de nombreux pays africains car nous sommes aujourd’hui présents dans 28 pays sur le continent.

Vous savez, il est difficile pour deux opérateurs de partager le même trafic alors qu’Owendo n’est pas le port de Singapour ou de Rotterdam…Nous avons réuni nos expertises respectives pour optimiser les capacités du port et tout le monde est gagnant.

Nous gagnons l’expertise de Bolloré dans la gestion des containers et de son côté Bolloré dispose d’une plateforme supplémentaire. Ensuite, en Afrique les ports font généralement l’objet de financements publics et dans ce cas précis, l’Etat a « gagné » un port moderne sans dépenser d’argent, ce qui est assez rare pour être souligné.

Dans quelles mesures les consommateurs Gabonais profiteront-ils directement et indirectement du nouveau Port International d’Owendo ?

Le port international d’Owendo a déjà permis la création de 500 emplois directs et plus de 1 000 emplois indirects  et les employés sont gabonais à plus de 80%. Il y aura également de nombreuses répercussions sur tout l’écosystème, notamment à travers la multiplication des sous-traitants qui emploient également des Gabonais.

Concernant la zone économique de Nkok dont nous avons la gestion, elle permet au Gabon de devenir économiquement plus compétitif et ses nouvelles infrastructures vont servir de levier au développement. Les productions seront exportées dans le nouveau port et de façon plus générale, en diminuant les prix de la logistique, la population bénéficiera de la baisse des coûts de transport, qui se répercuteront à terme sur les prix.

ENCADRE

Les succès de « Gabon Special Economic Zone » (GSEZ)

Créée en 2010, GSEZ, la joint-venture qui réunit Olam International Ltd (40,5%), la République du Gabon (38,5%) et Africa Finance Corporation (21%) pour développer la zone économique spéciale de Nkok, accueille aujourd’hui plus de 45 entreprises, principalement centrées autour de l’exploitation du bois.

L’objectif initial de l’Etat gabonais était d’attirer des investisseurs internationaux. Pari réussi : la plupart des sociétés sont étrangères et à ce jour, 118 structures ont démarré leurs activités tandis que 32 autres entreprises se sont déjà engagées à investir au Gabon. 2 200 personnes travaillent aujourd’hui dans la zone de Nkok qui devrait compter quelques 180 usines d’ici 3 ans.

Forte de ce succès, GSEZ s’est vu confier le développement de nouvelles infrastructures à l’instar du Terminal minéralier d’Owendo pour soutenir l’industrie minière, pour un coût de 120 millions de dollars. D’une capacité de 5m MT, le projet inauguré en 2016, a été réalisé avec célérité en moins de deux ans. Depuis le début de l’année, le terminal a ainsi géré plus de 1m MT.

Enfin, GSEZ soutient l’effort d’électrification du Gabon. Le projet conduit actuellement par la filiale gabonaise du groupe singapourien comprend la construction de lignes haute tension sur 490 km et de lignes basse tension sur 170 km, qui permettront d’électrifier 171 villages d’ici 2018.

 

Écrit par
African Business french

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