Le FMI inquiète et rassure

Le Fonds monétaire international ajuste faiblement ses prévisions de croissance économique. Ses économistes préviennent toutefois que l’incertitude, elle, est plus forte ; s’ils redoutent une pression inflationniste, ils ne distinguent pas de dangers immédiats.
Par Marie-Anne Lubin
Le FMI a légèrement ajusté à la baisse sa prévision de croissance mondiale pour 2021 à 5,9 % tout en la maintenant inchangée pour 2022, à 4,9 %. Cet ajustement modeste masque d’importantes disparités, soulignent les Perspectives de l’économie mondiale publiées le 12 octobre.
Selon le FMI, « la priorité absolue est de vacciner le monde ». Une action multilatérale beaucoup plus importante paraît nécessaire pour vacciner au moins 40 % de la population dans chaque pays, d’ici la fin de cette année, et 70 % d’ici le milieu de 2022.
L’Afrique subsaharienne défie cette tendance mondiale : le fonds a légèrement revu en hausses ses prévisions de croissance pour 2021 (+0,3 point à 3,7 %) mais ajusté en baisse sa prévision pour 2022 (-0,3 point à 3,8 %). Les prévisions de croissance pour le Nigeria (2,6 % en 2021 et 2,7 % en 2022) ne sont que marginalement revues, tandis que le FMI s’attend à un rebond meilleur que prévu cette année en Afrique du Sud (+1 point à 5,0 %), maintenant sa prévision de +2,2 % en 2022.
Concernant la région MENA, le FMI table sur une croissance moyenne de 4,1 %, tant en 2021 qu’en 2022. Avec un rebond de 5,7 % au Maroc cette année et de 3,1 % en 2022. Rebond plus modeste en Tunisie (+3,0 % et +3,3 %) et en Algérie (+3,9 % et +1,9 %).
L’institution retient l’hypothèse d’un baril à 59,1 dollars cette année, se montrant sceptique fasse à la flambée attendue en 2022 par les contrats « futures » des marchés financiers.
En Afrique subsaharienne, le FMI table sur un rebond de 6,0 % en Côte d’Ivoire en 2021 et de 6,5 % en 2022, le pays paraissant le bon élève parmi les pays à revenu moyen. Le Sénégal (+5,5 % en 2022) et le Cameroun (+4,6 %) ne sont pas loin, dans cette catégorie.
Rebond également en RD Congo (+4,9 % et +5,6 %) au Mali (+4,0 % et 5,3 %) et au Burkina Faso (+5,6 %). Au sein des producteurs de pétrole, la croissance du Gabon ne devrait pas dépasser 1,5 % cette année et 3,9 % l’an prochain.
« La reprise mondiale se poursuit, mais la dynamique s’est affaiblie, entravée par la pandémie », commente Gita Gopinath, conseillère économique et directrice du département des études au FMI. Qui souligne « une préoccupation majeure, les divergences dans les perspectives de croissance entre les pays ». Ces divergences sont une conséquence de la « grande fracture vaccinale » et des grandes disparités dans le soutien politique.
La peur de l’inflation entraîne l’inflation
D’autant que les niveaux de risques augmentent, que les compromis politiques sont devenus plus complexes dans le cadre de la pandémie qui se prolonge.
Dès lors, la politique monétaire devra trouver « un juste équilibre » entre la lutte contre l’inflation et les risques financiers et le soutien à la reprise économique. Sans compter le « risque majeur » d’une reprise de la pandémie via un nouveau variant.
Évoquant le spectre de l’inflation, le FMI rappelle que les répliques du choc de 2020 et la perspective de nouvelles restrictions pour ralentir le virus pourraient se traduire par une persistance dans les ruptures d’approvisionnement. Face à une hausse confirmée de la demande, les entreprises peuvent augmenter les prix et les travailleurs peuvent exiger des hausses de salaires plus facilement que par le passé.
Plus généralement, si les ménages, les entreprises, et les investisseurs commencent à anticiper une hausse des prix, ils risquent d’augmenter leur demande à court terme, créant ainsi une « hausse auto-réalisatrice des prix ». Pas de panique à court terme, rassure le FMI : « Il n’y a aucun signe d’un tel changement, les attentes étant toujours étroitement liées aux objectifs déclarés des banques centrales. »
Dès lors, selon le FMI, « la priorité absolue est de vacciner le monde ». Une action multilatérale beaucoup plus importante paraît nécessaire pour vacciner au moins 40 % de la population dans chaque pays, d’ici la fin de cette année, et 70 % d’ici le milieu de 2022.
D’autre part, le FMI appelle à « une action beaucoup plus importante pour lutter contre le changement climatique ». Chaque pays devra adapter sa politique budgétaire à ses conditions spécifiques, qu’elles soient économiques ou sanitaires, « tout en maintenant la crédibilité de son cadre budgétaire et monétaire ».
@Malu