Les systèmes de paiement instantanés poursuivent leur croissance

Progressivement, les systèmes de paiement instantanés font partie de l’infrastructure numérique du continent. Des outils comme le Gimac ou le PAPSS font leurs preuves. Reste à ces systèmes de gagner en inclusivité pour qu’aucune population ne soit exclue.
AfricaNenda et la CEA (Commission économique pour l’Afrique) publient la deuxième édition du rapport SIIPS consacré aux systèmes de paiement instantanés inclusifs. Ce document met en lumière la croissance soutenue de l’offre de systèmes de paiement instantané (SPI) et de la demande à l’égard de leurs fonctionnalités.
Des progrès considérables ont été accomplis en vue que des systèmes de paiement instantané complets et inclusifs fassent partie intégrante de l’infrastructure publique numérique (IPN) de l’Afrique, donnant ainsi naissance à un écosystème numérique fluide pour les personnes, les entreprises et les gouvernements.
« Il est impératif de répondre aux exigences de mise en place de systèmes d’authentification fiables pouvant fonctionner de manière transparente à travers le continent grâce à des systèmes d’identification numérique interopérables. »
Les SPI sont à la base de l’infrastructure publique numérique pour l’Afrique Le concept d’IPN a fait l’objet d’une attention particulière au niveau mondial, en tant que mécanisme permettant d’assurer l’inclusion dans l’économie numérique.
Trois SPI régionaux ont été lancés au cours des trois dernières années : GimacPay, qui se concentre principalement sur la fourniture de capacités IPS nationales et régionales pour combler les lacunes des pays de la CEMAC en Afrique centrale ; le système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS), développé par Afreximbank, qui est en phase pilote dans les pays de la zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest ; et le système de compensation instantanée des transactions (TCIB) en Afrique australe. Plusieurs nouveaux systèmes nationaux se profilent à l’horizon.
Le volume (+47%) et la valeur (+39%) des paiements traités ont connu une croissance rapide depuis 2018. En Afrique, les SPI ont pris en charge près de 32 milliards de transactions en 2022, pour un montant total d’environ 1 200 milliards de dollars. Pour l’heure, seuls neuf pays d’Afrique ont accès à des systèmes de paiement instantané dits « inclusifs » au stade avancé, à travers trois systèmes nationaux au Ghana, au Malawi et en Zambie et GIMACPAY, qui fait l’objet d’une analyse fouillée dans le rapport.
Selon Robert Ochola, PDG d’AfricaNenda prétend œuvrer « à faire en sorte que les SPII deviennent un moteur de la prospérité économique des Africains ». Le Rapport SIIPS 2023 montre qu’ensemble, « nous façonnons un avenir où l’inclusion financière numérique ne connaît pas de limites ».
Le rôle des banques centrales
Cependant, reconnaît-il, il reste des défis à relever en vue de passer du niveau d’inclusivité avancé à celui de la maturité dans l’écosystème en Afrique.
À ce jour, la plupart des SPI opérationnels ne sont pas classés, en raison du manque de données et d’informations relatives à leurs performances accessibles au public, ou n’ont atteint qu’un niveau élémentaire d’inclusivité, en ce sens qu’ils offrent une fonctionnalité de canal minimal et que seules les transactions de particulier à particulier (P2P) et de particulier à entreprise (P2B) sont prises en charge.
En revanche, sept pays n’ont toujours pas de fonctionnalité nationale existante ou prévue. Le Botswana, le Cap-Vert, la RD Congo, l’Érythrée, la Libye, les Seychelles et le Sud-Soudan n’ont pas encore – ou n’ont pas encore annoncé publiquement leur intention de développer – de fonctionnalités de système de paiement instantané domestique.
De plus, 27 pays n’ont pas encore mis en place de SPI nationaux, mais 17 d’entre eux l’envisagent et trois SPI régionaux sont également en cours de développement sur le continent.
Le rapport souligne que les banques centrales restent des « acteurs clés » des systèmes de paiement et de l’infrastructure, aux côtés des acteurs du secteur privé et des associations professionnelles. Outre leur fonction centrale de gouvernance, les banques centrales jouent souvent le rôle de propriétaire, de superviseur, d’agent de règlement ou, dans certains cas, d’opérateur.
En outre, des sociétés privées externes sont intervenues en tant qu’opérateurs de systèmes. Quinze opérateurs de système sont des entreprises privées, qui jouent également un rôle clé en tant que propriétaire et dans la gouvernance du système. Dans certains cas, les différents rôles (hormis celui d’agent de règlement) sont remplis par des associations sectorielles. Enfin, pour certains systèmes, les rôles sont remplis par des accords bilatéraux. Le mode de gouvernance est souvent déterminé par la structure de propriété. Les banques et les organismes de gestion des marchés, pour leur part, sont des acteurs clés des systèmes de paiement interbancaires.
De leur côté, les banques commerciales sont les principaux acteurs des systèmes interdomaines, suivies par les banques participantes puis par les opérateurs mobiles. Standard Bank Group et Ecobank participent au plus grand nombre de systèmes. Les quatre opérateurs mobiles ayant la plus grande empreinte IPS sont Airtel, MTN, Orange Mobile, et Vodacom.
Améliorer l’inclusivité
Pour leur part, les Fintechs « jouent un rôle essentiel dans la chaîne de valeur des systèmes de paiement intégrés en fournissant des technologies innovantes aux utilisateurs finaux, aux opérateurs de systèmes de paiement intégrés et aux fournisseurs de systèmes de paiement ». Elles s’associent généralement à des participants directs pour fournir des services frontaux ou dorsaux, mais en tant que prestataires de services techniques, elles sont des facilitateurs plutôt que des acteurs du système.
En matière d’inclusivité, le rapport souligne « quelques progrès » mais reconnaît : « Aucun système ne peut encore être qualifié de mature. »
« La deuxième édition du Rapport SIIPS met en évidence la progression significative de l’adoption des paiements numériques à travers une étape cruciale dans la réalisation effective des objectifs de la ZLECAf. Toutefois, il est impératif de répondre aux exigences de mise en place de systèmes d’authentification fiables pouvant fonctionner de manière transparente à travers le continent grâce à des systèmes d’identification numérique interopérables », commente Mactar Seck, de la CEA
Laquelle entend soutenir les pays africains dans la mise en place d’IPN inclusives, comprenant ces systèmes d’identification numérique interopérables. « Cette collaboration favorisera des paiements numériques sûrs, en temps réels et complets sur l’ensemble du continent. »
De son côté, la Banque mondiale a lancé le projet FASTT (Frictionless Affordable Safe Timely Transactions) en vue d’accélérer l’adoption des paiements numériques interopérables sur le continent africain et dans les marchés émergents et les économies en développement. L’objectif : favoriser l’inclusion financière, l’économie numérique, l’efficacité des programmes et services publics, ainsi que l’amélioration des paiements transfrontières.
Le rapport s’appuie également sur des enquêtes et des entretiens approfondis avec des experts en paiements numériques, des utilisateurs finaux et des microentreprises et PME dans les zones urbaines et périurbaines du Cameroun, du Malawi, du Maroc, du Rwanda et du Sénégal.
@ABanker