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L’agence R&I acte l’incertitude entourant la Tunisie

L’agence R&I acte l’incertitude entourant la Tunisie
  • Publiéaoût 29, 2023

La société de notations financières Japan Rating Investment and Information abaisse son « rating » sur la Tunisie. Elle note des progrès en matière de maîtrise des grands équilibres budgétaires et financiers, mais considère que les incertitudes l’emportent, faute d’accord avec le FMI.

 

L’information a très vite été relayée par la Banque centrale de Tunisie elle-même. L’agence de notation japonaise Japan Rating Investment and Information Inc (R&I) a décidé, ce 29 août 2023, de dégrader la notation souveraine de la Tunisie de « B » à « B- »  tout en maintenant la perspective « négative ».

Des déficits budgétaires relativement élevés persistent, confirme la note de R&I. Les perspectives d’assainissement budgétaire sont incertaines et le ratio de la dette publique reste élevé. Tenant également compte du déficit important de la balance des opérations courantes, l’agence estime que les fronts budgétaire et extérieur restent « dans une situation difficile ».

Toutefois, comme le gouvernement s’est efforcé de sécuriser les devises et de détenir un certain montant de réserves de change, il est peu probable que le pays soit confronté à des problèmes immédiats de liquidités en devises.

Le soutien du FMI constitue un facteur crucial, non seulement pour assurer la liquidité en devises, mais aussi pour atteindre la stabilité macroéconomique et stimuler la croissance économique grâce à des réformes structurelles.

« Néanmoins, les incertitudes grandissent quant à la capacité du gouvernement à assurer le service de la dette en devises à moyen terme », jugent les analystes, qui s’inquiètent du manque « de développement clair » pour obtenir le soutien financier du FMI (Fonds monétaire international).

Évoquant sa « perspective négative », R&I prévient qu’elle abaissera la note « si les inquiétudes concernant la viabilité de la dette publique s’aggravent ». L’accélération de l’inflation, consécutive à la flambée des prix mondiaux de l’énergie et des denrées alimentaires et à d’autres facteurs, pèse sur l’économie. Le PIB réel était encore inférieur au niveau d’avant la pandémie à la fin de 2022. Cela étant, l’économie se redresse grâce au retour de la demande touristique et à d’autres facteurs plus favorables, en 2023.

Le gouvernement prévoit une croissance du PIB réel de 1,8 % pour 2023. La projection de la Banque mondiale est de 2,3 %. L’économie devrait croître à un rythme modéré de 2% à 3 % à partir de 2024, « tout en dépendant des tendances de la demande extérieure et de la politique intérieure », avancent les experts.

Un déficit toujours important

La balance des comptes courants est largement déficitaire, l’excédent des services étant insuffisant pour couvrir le déficit commercial. Le déficit de la balance courante s’est creusé en 2022, en raison de la flambée des prix à l’importation de l’énergie et des denrées alimentaires. « Même si le déficit se réduit en 2023, il restera important », commente R&I.

La dette extérieure du pays est importante, ce qui rend l’économie très vulnérable aux chocs extérieurs. Bien que le niveau des réserves de change ne soit pas suffisant, il équivaut à environ trois mois d’importations. Le déficit budgétaire est également jugé « important », s’élevant à 7,6 % du PIB en 2022. Le gouvernement prévoit un déficit budgétaire de 5,2 % en 2023.

Il est vrai, reconnaissent les analystes, que les recettes fiscales augmentent régulièrement et la croissance des dépenses salariales, qui représentent près de la moitié des dépenses publiques totales, est également maîtrisée. Cela dit, « comme il existe un risque de hausse des dépenses pour les subventions, il reste à voir si le gouvernement est en mesure de réduire son déficit budgétaire comme prévu ».

L’encours de la dette de l’administration centrale se situe à un niveau « élevé », environ 79 % du PIB à la fin de l’année 2022. Bien que le ratio dette/PIB soit susceptible de diminuer en 2023, il est difficile de s’attendre à ce qu’il diminue régulièrement à moyen terme, à moins d’ouvrir une perspective ferme de réduction du déficit budgétaire.

Bien que le gouvernement et le FMI soient parvenus à un accord au niveau des services sur une assistance financière en octobre 2022, aucun progrès n’a été réalisé depuis lors. Pour répondre aux exigences de l’aide du FMI, le gouvernement met en œuvre un programme de réformes structurelles comme condition de l’aide financière, y compris des restrictions sur les dépenses du gouvernement pour les salaires des employés publics, des réformes du système de subventions du gouvernement et des entreprises publiques, et l’amélioration de l’environnement des affaires parmi d’autres mesures.

« Bien que des progrès aient été réalisés dans certaines réformes, la mise en œuvre de la réforme des subventions aux carburants a été reportée en raison de l’ampleur de l’impact sur la société », observe l’agence nipponne.

Le gouvernement et la Banque centrale s’efforcent d’obtenir des soutiens financiers de la part de gouvernements étrangers et d’organisations internationales, et devraient être en mesure de lever suffisamment de fonds pour cette année, même sans l’aide du FMI.

Néanmoins, R&I estime que le soutien du FMI constitue « un facteur crucial, non seulement pour assurer la liquidité en devises, mais aussi pour atteindre la stabilité macroéconomique et stimuler la croissance économique grâce à des réformes structurelles ».

Les analystes concluent sur l’incertitude politique qui persiste « depuis que le président Kaïs Saïed a limogé le Premier ministre, les yeux sont rivés sur l’évolution socio-économique et politique du pays ainsi que sur l’avancement des négociations avec le FMI au sujet de l’aide financière ».

@ABanker

Écrit par
Laurent Soucaille

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