La ruée vers le dollar ne se dément pas

En dépit de sa vigueur sur les marchés, le dollar reste recherché par les opérateurs africains. Les banques centrales du continent ont raison de réagir, juge un économiste de RMB, car la faiblesse des monnaies, qui devrait se poursuivre à court terme, est un cercle vicieux.
Les soubresauts mondiaux récents ont gravement affaibli les économies et les monnaies d’Afrique de l’Ouest, mais les entreprises et les investisseurs se tournent vers les actifs en dollars pour atténuer les dégâts. Tel est le constat d’Abiodun Adebimpe, responsable du pôle Conservation pour RMB (Rand Merchant Bank) Afrique de l’Ouest.
En raison des conditions économiques turbulentes, les entreprises se tournent de plus en plus vers des conseillers disposant d’un vaste savoir-faire mondial pour obtenir des conseils d’experts.
D’abord, un constat simple : la plupart des économies d’Afrique de l’Ouest étant axées sur les matières premières, tout développement au sein de l’économie mondiale qui affecte l’offre ou la demande d’importations et d’exportations de matières premières a pour effet d’affaiblir considérablement les monnaies.
De plus, les événements mondiaux récents et en cours ont entraîné une destruction massive de la demande de pétrole brut, de produits agricoles et de métaux précieux tels que l’or. Les chaînes d’approvisionnement ne se sont pas encore rétablies.
En conséquence, la plupart des monnaies ouest-africaines, telles que le naira nigérian et le cédi ghanéen, se sont considérablement affaiblies. C’est une source d’inquiétude majeure, et un défi permanent, pour la plupart des entreprises d’Afrique de l’Ouest.

Ce, d’autant que les déséquilibres budgétaires et monétaires aggravent le problème. Le fait que la plupart des marchés ouest-africains dépendent des importations implique une énorme demande de devises pour payer les factures d’importation. En raison de la diminution des réserves extérieures, les banques centrales ne sont pas en mesure de répondre rapidement et de manière adéquate à ces demandes.
La plupart des marchés considérés connaissent également un surendettement fiscal massif. L’une des conséquences est la nécessité d’emprunter auprès de prêteurs bilatéraux et multilatéraux mondiaux qui exigent des autorités locales qu’elles affaiblissent délibérément leur monnaie locale en ajustant leurs taux de change officiels en conséquence afin de répondre à la demande de devises étrangères. L’affaiblissement des monnaies locales rend la conversion en devises fortes plus coûteuse et moins attrayante.
Des conséquences pour l’économie
L’ensemble de ces facteurs a contribué à affaiblir les monnaies ouest-africaines et les perspectives restent négatives à court et à moyen terme. La perte de confiance dans les monnaies locales signifie qu’elles ne sont plus considérées comme une réserve de valeur stable.
Mais les entreprises et les investisseurs ont réagi en se protégeant et en protégeant la valeur de leurs revenus et de leurs avoirs dans des monnaies locales qui se déprécient rapidement.
Les investissements dans des titres libellés en dollars, tels que les euro-obligations, les actions en dollars et autres devises fortes, les instruments de dette sous forme d’obligations d’État et d’entreprises, ainsi que les instruments du Trésor américain portant intérêt, sont devenus les placements préférés des investisseurs. Et la demande devrait s’accroître.
Car le constat est clair, considère l’économiste : ne pas détenir de monnaies africaines a des conséquences pour les économies africaines. Cela augmente encore la demande en devises et continue à créer un écart d’arbitrage entre les marchés des changes officiels et non officiels, ce qui crée une pression d’arbitrage supplémentaire sur les monnaies locales. Cela crée une pression supplémentaire sur les taux de change jusqu’à ce que les gouvernements mettent en œuvre les politiques monétaires et fiscales adéquates qui permettent aux monnaies locales de mieux refléter les fondamentaux de l’économie.
La plupart des gouvernements d’Afrique de l’Ouest ont commencé à prendre les bonnes mesures dans ce sens en ajustant leurs taux de change officiels et, dans certains cas, en empruntant en dollars pour renforcer leurs réserves extérieures, même si cela peut prendre un certain temps avant de se concrétiser.
Le naira nigérian, en particulier, est resté sous forte pression depuis les élections du mois dernier, qui ont été suivies de près. La monnaie nigériane risque de continuer à se déprécier au cours des prochains mois en raison des difficultés majeures que pose le redressement par des réformes économiques dans une économie de cette taille. La perspective d’une baisse des prix du pétrole brut et du gaz naturel continuera probablement à peser sur la monnaie.
Sans oublier le problème des envois de fonds vers le Nigeria : de nombreuses entreprises ne soutiennent plus ces transactions. Plus important encore, les investissements technologiques, qui représentaient une augmentation significative des investissements étrangers, ont diminué de manière drastique.
@ABanker