Fitch améliore son jugement sur la Tunisie

Dans l’espoir d’un accord définitif avec le FMI, l’agence Fitch Ratings a relevé sa notation de crédit attribuée à la Tunisie. Le pays devrait être en mesure de faire face à ses échéances financières, à condition que les réformes soient bien acceptées dans le pays.
L’agence Fitch Ratings a relevé d’un cran sa notation sur la Tunisie à « CCC+ » considérant que l’accord conclu avec le FMI, pour un nouveau mécanisme élargi de crédit (MEDC) de 48 mois d’un montant de 1,9 milliard de dollars, « permettra de débloquer des montants importants de financement officiel des créanciers et de soutenir la consolidation budgétaire ». Bien sûr, subsiste une « incertitude quant à l’adhésion continue au programme ».
« Des réformes des subventions et des entreprises d’État seront nécessaires pour améliorer le déficit structurel de la Tunisie. La suppression progressive des subventions aux carburants, prévue en 2023, sera la clé de l’assainissement budgétaire ».
Le programme du FMI vise à remédier aux principales faiblesses structurelles de la Tunisie (par la mobilisation des recettes, le contrôle de la masse salariale publique, les subventions et les réformes des entreprises du secteur public) et ne nécessitera pas de restructuration de la dette. L’approbation du programme par le conseil d’administration du FMI et les indications d’une forte conformité pourraient soutenir davantage le profil de crédit de la Tunisie.
Les besoins de financement du gouvernement seront « probablement couverts », pronostique Fitch Ratings ; ces besoins atteindront 16,4% du PIB en 2022 et 16,8% du PIB en 2023. Ils sont poussés à la hausse par les importantes dépenses supplémentaires pour absorber le choc de la guerre en Ukraine et les échéances de la dette extérieure, qui atteindra 2 milliards $ en 2023.
Selon les autorités, un financement d’environ 1,3 milliard $ de l’Arabie saoudite, d’Abou Dhabi et d’Afreximbank est au stade des négociations finales, ce qui, avec la première tranche du FMI, comblerait le déficit de financement pour 2022. La Tunisie est en train de négocier un autre financement de 1,8 milliard $, qui, ajouté aux décaissements prévus couvrirait les besoins de financement budgétaire et extérieur en 2023.
Les experts préviennent : « Si le plan de financement offre une certaine visibilité sur la capacité de la Tunisie à faire face aux obligations du service de la dette extérieure à venir, les pressions financières pourraient réapparaître si la Tunisie s’écarte des objectifs du programme du FMI, mettant en péril de nouveaux décaissements, ou si les prix des matières premières restent supérieurs à nos prévisions. » Ce, d’autant que la Tunisie sera confrontée à un pic d’échéances de la dette extérieure en 2024 (environ 2,6 milliards $).
Incertitudes sociales
À la faveur des réformes engagées et la baisse des produits de base, le déficit public devrait retomber à 5,6% du PIB en 2023 et à 3,8 % du PIB en 2024, contre 7,3 % en 2022, avec la baisse des prix des produits de base et la mise en œuvre des réformes.
« L’accord salarial signé avec le principal syndicat, l’UGTT, en septembre, limite la croissance de la masse salariale à 5,5 % par an sur les trois prochaines années, ce qui implique une baisse en termes réels. Toutefois, les économies ainsi réalisées seront largement compensées par l’augmentation des charges d’intérêt », commentent les analystes de Fitch. Note publiée avant le « coup de force » de l’UGTT, qui a suspendu, le 1er décembre 2022 sa collaboration avec le gouvernement tunisien, lui reprochant de ne pas assez communiquer sur l’état des négociations avec le FMI.
D’ailleurs, reconnaît Fitch, « des réformes des subventions et des entreprises d’État seront nécessaires pour améliorer le déficit structurel de la Tunisie. La suppression progressive des subventions aux carburants, prévue en 2023, sera la clé de l’assainissement budgétaire ».
Au plan politique, l’agence de notation espère que les élections législatives du 17 décembre apporteront « un peu plus de stabilité dans un nouveau régime présidentiel avec un processus législatif simplifié ». Le boycott de plusieurs partis d’opposition fait toutefois craindre des troubles sociaux, alimentés par l’inflation et un chômage élevé.
Justement, l’« inflation restera élevée », préviennent les experts : De 9,2% en glissement annuel, à octobre 2022, elle pourrait atteindre 10,2% en 2023, entretenue par les augmentations des prix du carburant dans le cadre du programme du FMI. De nouvelles hausses de taux « à petite échelle », sont probables en 2023, tandis que la croissance économique, de 2,4% en 2022, pourrait ne pas dépasser 1,6% l’an prochain et osciller entre 2% et 2,5% les années suivantes.
@AB